L’éducation des enfants de Cheminots, dans cette Cité que Marcel Picot et Robert Malaquin nous décrivaient sous un angle panoramique, passait certes par l’impressionnant complexe scolaire décrit sous la plume de Jacques Legrand, Robert Lienard et Guy Merat, mais pas seulement.
Ce témoignage de Michel Deveaux, Daniel Pecqueux et Roland Hackspille porte dans sa forme les traces d’une éducation à la beauté dont le sujet atteste d’une réalité quotidienne de fond. Bienvenu dans le parc des Buttes Chaumont…
« Aujourd’hui, par une belle journée, il me semble que je suis transporté dans le parc des Buttes Chaumont d’il y a cinq ou six ans.
Par les belles journées d’été, ce beau paysage que je vais vous décrire est animé de nombreux citadins. Au dessus d’eux, dans le ciel d’azur, pas un nuage ne plane.
Ce grand coin de terre est bordé d’un chemin. Il est parsemé de pelouses verdoyantes que garnissent de belles petites pâquerettes. Les pelouses sont séparées par des chemins ; d’un grand carré de marronniers au feuillage épais et quelques sapins.
Vers le milieu, des buissons touffus abritent des bandes d’oiseaux. Plus haut sur une butte se trouve une cuve à eau qui alimente une partie de la Cité. En bas de cette butte, il y a une source qui donne naissance à un ruisseau qui forme des méandres tout le long de son cours. Il passe sous un petit pont de ciment que deux saules pleureurs ombragent. Les parapets de ce pont ressemblent à des troncs d’arbres que l’on a sciés. Le ruisseau continue sa route, s’élargit, se rétrécit, passe sous terre, ressort quelques mètres plus loin en cascade et il se jette dans un lac cimenté où un énorme saule pleureur laisse tremper ses branches dans une eau claire.
Au cœur des Buttes Chaumont, sur une petite butte, un kiosque se dresse ; ce kiosque est entouré d’arbres. L’été, un marchand de glaces passe. Sur les pelouses, les femmes tricotent ; des hommes jouent aux cartes. Dans les buissons, de nombreux enfants jouent à cache-cache et sur les branches, les oiseaux gazouillent.
S’il y avait eu dans les Buttes Chaumont des animaux de toutes les espèces, elles auraient ressemblé à un jardin zoologique, que d’innombrables personnes seraient venues visiter. »
Troublant, ce témoignage l’est assurément par sa précision et son style; rappelons en effet qu'il fut écrit durant l'année scolaire 1945-1946 par des enfants âgés d'une douzaine d'années! Mais il l’est aussi par la sensation de sérénité qui s’en dégage ; une sérénité que ne dégageait pas le seul parc des Buttes Chaumont au demeurant, ce que nous pourrons vérifier dans notre prochain billet à travers l’évocation des équipements médicaux-sociaux.